Un volcan sous-marin responsable d’une activité sismique intense au large de Mayotte

26/09/2023

5 minutes

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océans et technologies

Niché au cœur de l’océan Indien entre l’Afrique et Madagascar, Mayotte avait jusqu’ici enregistré une activité sismique modérée. Mais quand un séisme de magnitude 5,9 sur l’échelle de Richter se produit sur l’île en mai 2018, la stupeur est grande. Depuis cet évènement, une mission de surveillance a été mise en place par l’État français afin de comprendre l’origine et les mécanismes de cette nouvelle activité menaçante pour le territoire et ses populations.

 Comme beaucoup de territoires insulaires, on pouvait imaginer l’archipel de Mayotte particulièrement exposé à la montée des eaux, avec 80% de ses villages construits au bord de mer. Mais depuis 2018 et ce tremblement de terre enregistré avec un coefficient de 5,9 sur l’échelle de Richter, le territoire s’enfonce à une vitesse encore plus inquiétante et vertigineuse.

En 2019, la première campagne MAYOBS de surveillance de l’activité sismique au large de Mayotte  dévoile l’existence d’un volcan sous-marin nommé Fani Maoré, à peine éloigné de 50 km de l’archipel. Les secousses ressenties en 2018 sur l’île ont été provoquées par la remontée du magma de ce volcan au sein de la croûte terrestre. Ce véritable colosse sous-marin émet plus de 400 mètres cube de lave par seconde et son éruption en 2018 a eu des conséquences majeures, entrainant le déplacement de l’archipel de 24 cm vers l’est et l’enfouissant de 19 cm de profondeur.

Volcan sous-marin Fani Maoré au large de Mayotte (cercle blanc). Crédits : MAYOBS-IPGP/CNRS/IFREMER/BRGM

Une montagne de données pour une surveillance étroite de la zone

Depuis 2019, le Réseau de Surveillance Volcanologique et Sismologique de Mayotte (REVOSIMA) est coordonné par l’Institut Physique du Globe de Paris (IPGP) et le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM), en collaboration avec de nombreuses institutions françaises tels que l’Institut Français de Recherche pour l’Exploitation de la Mer (Ifremer) ou encore le Centre National de la Recherche Scientifique (CNRS).

 REVOSIMA a pour objectif de comprendre les différents phénomènes géophysiques au large de Mayotte, à l’aide de mesures réalisées fréquemment sur le terrain pour permettre la prévention et la protection des populations, mais aussi de pérenniser la mise en place de ces réseaux d’observations.

Les campagnes MAYOBS se succèdent ainsi à proximité de Mayotte, à raison en moyenne de 5 à 6 campagnes par année. Les instruments déployés sont nombreux (sismomètres, capteurs de pression absolue, hydrophones etc…) et les données collectées accumulent chaque année un peu plus les preuves du rôle majeur joué par ce volcan Fani Maoré sur la zone.

MAYOBS25, un projet interdisciplinaire au plus proche du terrain

Cette année, du 11 au 28 Septembre 2023, la campagne MAYOBS a pris le large pour sa 25ème édition à bord du navire de recherche Marion Dufresne afin de collecter les données sismiques et géophysiques à l’Est de Mayotte.

L’opération s’articule autour de trois axes principaux :

  • l’entretien d’instruments déjà placés dans les stations de fond de mer: sismomètres de fond de mer, capteurs de pressions absolue et hydrophones…
  • la collecte de données acoustiques multiples : sondeurs multifaisceaux positionnés sur le bateau, sondeurs de sédiments…
  • le suivi de l’activité sismique de la zone et des modifications associées du relief sous-marin

Cette 25ème opération MAYOBS renforce en particulier la coopération entre les acteurs scientifiques de différentes disciplines océaniques : géologues, sismologues, vulcanologues, biogéochimistes et pour la première fois cette année, océanographes physiciens. Ces derniers ont la lourde tâche de collecter les données de plusieurs sondeurs acoustiques synchronisés de type ADCP ou courantomètres acoustiques à effet doppler, afin d’évaluer au mieux les courants marins de la région.

Un port à Mayotte © Isabelle Bonillo / AFD

Un observatoire profond et des perspectives ambitieuses à long-terme

Les nombreuses campagnes MAYOBS ont permis de grandes avancées sur la connaissance scientifique de l’activité sismique au large de Mayotte.

Dans l’objectif de la mise en place d’un réseau de surveillance pérenne, un châssis a été posé pour la première fois l’an passé afin de mieux caractériser les dynamiques océaniques de la zone. Mais des sites de dégazages sous-marins ont été récemment découverts à proximité du volcan. Pour pouvoir espérer déployer et maintenir sans risque des instruments en profondeur, les scientifiques vont maintenant devoir analyser et comprendre ces mécanismes de dégazage, et la dynamique océanique associée.

Le Marion Dufresne au large de Mayotte, durant la campagne MAYOBS15.  Crédit : IPGP, BRGM, Ifremer, CNRS

A long terme, REVOSIMA  ambitionne de pouvoir installer à poste un observatoire câblé de fond de mer. Ce projet ambitieux, baptisé MARMOR  permettrait la surveillance sismique en continu de la zone, une nécessité pour cette région d’Outre-Mer reconnue aujourd’hui comme un haut-lieu d’activité volcanique de la planète.

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