Les grands fonds marins : si peu explorés et déjà tellement sous pression !

15/05/2025

19 minutes

Ifremer

A la croisée d’enjeux écologiques, géopolitiques, technologiques et économiques, l’océan profond interroge autant qu’il fascine car il abrite de nombreuses ressources dont une biodiversité foisonnante. Ses richesses minérales sont très convoitées par l’industrie minière qui intensifie actuellement la pression. Son exploration scientifique progresse mais est encore insuffisante pour assurer des garde-fous. Peut-on prendre le risque de causer des dommages irréversibles avant de connaître ?

Par Marguerite Castel

Photo de couverture : Gamba monstrueuse (Cerataspis monstrosus) photographiée par le ROV Victor 6000 sur le site hydrothermal Ashadze le plus profond du monde, à 4200 m de profondeur.  Ifremer, 2007. https://image.ifremer.fr/data/00569/68066/

 

Réunis en mars 2025, les 168 États membres de l’Autorité internationale des fonds marins ont examiné une nouvelle fois un projet de code minier afin d’édicter les règles encadrant l’extraction minière sous-marine en haute mer. Créée en 1994 sous l’égide de l’ONU, l’AIFM négocie ces futures régulations pour l’exploitation industrielle des ressources du plancher océanique sous sa juridiction (les eaux internationales qui sont au-delà des eaux territoriales des ZEE). Ces négociations n’ont pas encore abouti. Elles patinent déjà depuis dix ans. Une nouvelle session de discussions est prévue en juillet 2025, avec l’objectif de trouver un accord.

D’autant que la pression de l’industrie minière s’intensifie. Plusieurs entreprises ayant investi dans l’exploration des fonds marins y convoitent le manganèse, le nickel, le cuivre, le cobalt et les terres rares dont les gisements se situent en majorité en haute mer. A l’instar de l’entreprise canadienne The Metals Company (ex Nautilus minerals) qui monte d’un cran. Après avoir annoncé qu’elle va déposer la première demande de contrat d’exploitation en juin 2025 via sa filiale Nori (Nauru Ocean Resources Inc.) auprès de l’AIFM, elle a révélé le 27 mars dernier être déjà en négociation avec l’administration américaine pour lancer l’exploitation avec ou sans code minier. Donald Trump tente aussi le passage en force ! Le 24 avril 2025, il a signé un décret visant à accélérer l’exploration et l’exploitation des fonds marins, y compris en eaux internationales.

Ce qui revient à agir en dehors d’un cadre juridique (droit de la mer) et de contourner la seule autorité compétente en haute mer.

Seule l’exploration est autorisée et encadrée

L’AIFM n’autorise jusqu’alors que l’exploration afin de mieux connaître les fonds marins : 31 contrats sont en cours, conduits par des États avec des centres de recherches ou des entreprises privéesLa France en mène deux avec l’Ifremer : en zone Clarion-Clipperton dans le Pacifique nord et sur la dorsale médio-Atlantique.

Aucune licence d’exploitation n’est encore accordée en attendant d’aboutir au code minier.

Encadrer l’extraction minière sous-marine devra en outre correspondre à l’autre mission essentielle de l’AIFM : protéger l’environnement !  Allier ces deux objectifs semble paradoxal dans un contexte de manque de connaissances scientifiques majeures sur des écosystèmes peu accessibles et encore largement inexplorés.

Régions où l’exploration minière est en cours en haute mer (la zone CCZ), dans l’océan indien, sur la dorsale médio atlantique et dans le nord-ouest Pacifique. Source @ISA

Moratoire de 10 à 15 ans pour connaître et tester

La communauté scientifique et les défenseurs de l’environnement redoutent un feu vert précoce à l’extraction minière. Quelles en seraient les incidences sur la biodiversité des abysses, sur la croûte terrestre et sur le fonctionnement même du système océan ? Ils assurent que les connaissances actuelles ne sont pas suffisantes pour déterminer les garde-fous nécessaires.  C’est pourquoi 32 pays, dont la France (depuis janvier 2023), réclament un moratoire pour interdire l’exploitation minière tant que son innocuité pour l’environnement n’aura pas été démontrée.

Le 31 mars, à l’occasion du sommet SOS Océan, à Paris, le paléontologue et biologiste marin Bruno David et l’océanographe Françoise Gail ont dévoilé les conclusions de leurs travaux, sur les conséquences du lancement de l’exploitation minière des grands fonds marins. Epaulés par un comité scientifique d’une quinzaine de chercheurs internationaux, ils prônent un moratoire « pendant dix à quinze ans », le temps de mieux comprendre le fonctionnement de ces écosystèmes.

« Il ne s’agit pas seulement de protéger un oursin ou un concombre de mer, si extraordinaires soient-ils, avance l’ancien président du Muséum national d’histoire naturelle de Paris. Les écosystèmes profonds sont totalement connectés au reste de la planète, les modifier pourrait avoir des répercussions sur les grands cycles biochimiques de la Terre, y compris sur les continents ».

C’est donc une course contre la montre qui oppose deux temporalités et deux enjeux : celle de la science qui cherche à mieux connaître et à conserver la biodiversité face à celle de l’économie minière pressée d’assurer notre transition énergétique et numérique.

Les réponses seront juridiques mais au-delà, c’est un formidable enjeu de connaissance que sert la découverte des grands fonds marins. Les explorations donnent lieu à une importante littérature scientifique qui peut déjà éclairer la décision internationale avec objectivité.

Dans les conditions extrêmes des profondeurs : la vie !

L’océan profond au-delà des 1000 mètres représente 75 % du volume océanique mondial, soit plus d’un milliard de km3. Il se situe au-delà du plateau continental et comprend les fonds marins, le fond océanique et leur sous-sol.  C’est le plus grand biome (macro écosystème) continu sur Terre mais aussi le moins exploré ! Aujourd’hui, 25 % des océans ont été cartographiés et 5 % des grands fonds marins ont été explorés avec précision, selon l’Unesco.

Cette zone marine débute seulement à -200 mètres sous la surface :  à la limite de pénétration de la lumière, là où il n’y a plus de photosynthèse. Jusqu’à -1000 m, c’est la zone crépusculaire, puis au-delà la zone aphotique : il y fait sombre et froid (2 à 3 degrés en moyenne) et la pression augmente d’un bar tous les 10 mètres ! La profondeur moyenne est de 3800 m et maximale à 11000 m dans la fosse des Mariannes (Océan Pacifique nord-ouest).

Ces conditions extrêmes n’empêchent pas la présence très diversifiée du vivant : bactéries, crevettes, modioles, poissons, coraux etc. 270 000 espèces différentes sont désormais connues et l’inventaire est loin d’être clos :  1 à 10 millions sont estimées.

Dessin de montagnes sous les mers @ Julie Terrazoni

Une mosaïque d’habitats

Ces diverses formes de vie sont associées à des habitats spécifiques.

En majorité, ce sont les plaines abyssales, des fonds sablo-vaseux qui occupent 80 % de l’océan profond, entre 3000 et 5500 m de profondeur. De très petites espèces, peu nombreuses mais très diversifiées, y vivent de l’apport des particules tombant de la surface.

Dans ce vaste espace abyssal, les plaines sont ponctuées de reliefs créés par l’activité volcanique :  les fosses, les canyons, les monts sous-marins et les dorsales océaniques. De véritables oasis des profondeurs où la vie est abondante ! On y a découvert des sites hydrothermaux formés de fumeurs noirs expulsant un fluide très chaud (400 degrés) composé d’éléments chimiques provenant des entrailles de la terre (zones d’accrétion) ainsi que des sources froides (zones de subduction). Ces écosystèmes sont soutenus par différentes sources d’énergie. Ils sont des foyers de biodiversité, offrant des habitats essentiels à de nombreuses espèces qui viennent se reproduire, se nourrir ou se cacher.

« En 1977, la découverte d’écosystèmes associés aux dorsales océaniques a révolutionné notre compréhension de la vie sur terre ! », précise Jozée Sarrazin. Une foison d’animaux vit  des sources hydrothermales  à proximité de ces geysers sous-marins, riches de sulfures et de métaux. « Là, c’est l’énergie chimique qui est le moteur des réseaux alimentaires. Grâce à la chimiosynthèse microbienne, toute une faune endémique s’épanouit », précise l’écologue qui s’intéresse à la vie des grands fonds depuis 30 ans.

Crabes vivant à proximité de cheminées hydrothermales dans le nord-est du Pacifique. Photo prise lors de la campagne d’exploration Mescal Leg 1 2002. @Ifremer

Cette biodiversité interroge autant qu’elle fascine. Qui est là ? Dans quel type d’environnement vit chacune de ces espèces ? Comment s’épanouissent-elles dans l’obscurité, dans des conditions de pression et de température extrêmes ? Quelles sont leurs capacités de restauration ? Quid de leur résilience ?  Quel est leur rôle dans le fonctionnement global de l’océan ?

L’observation est menée tambour-battant par la communauté scientifique, à renfort de prouesses technologiques.

Toutes ces découvertes, toutes ces données monitorées, tous ces échantillons remontés et passés à la loupe sont des promesses pour l’espèce humaine.

Un eldorado de minéraux ?

Le fond regorge de vie et aussi de métaux convoités : fer, manganèse, cobalt, nickel, cuivre. Des composants largement utilisés pour l’énergie des voitures électriques, les éoliennes et toute une gamme d’appareils numériques.

Trois types de gisements de minéraux sont ciblés par l’industrie minière. Or chacun est associé à des écosystèmes particuliers dont certains sont des îlots de biodiversité abritant des espèces endémiques à préserver.

D’abord les nodules polymétalliques présents dans les océans Pacifique, Atlantique et Indien. Posées sur de vastes étendues de plaines abyssales, ces concrétions rocheuses se forment via la précipitation de minéraux avec de l’eau de mer sur un noyau organique. C’est l’un des processus géologiques connus les plus lents, progressant à un taux de 2-10 mm/million d’années. C’est donc une ressource non renouvelable.

Ensuite de riches dépôts de minéraux sulfurés, formés autour des sources hydrothermales, le long des dorsales océaniques (là où les plaques tectoniques se rencontrent) et de certains volcans sous-marins. Ils ont été générés par le fluide hydrothermal : cette eau chaude et corrosive lessive les roches de la croûte océanique et se charge en métaux et en sulfures. Lorsqu’elle jaillit du fond de la mer, les métaux précipitent au contact de l’eau froide et s’agrègent en larges dépôts au niveau des dorsales et des arcs océaniques.

Les encroûtements polymétalliques se déploient sur les flancs rocheux et les parois des monts sous-marins en couches épaisses de quelques centimètres. Ils sont riches en métaux précieux. Encore peu étudiées, l’abondance, la biodiversité et l’endémicité de leur faune sont variables selon les sites.

On ne connait pas toute l’ampleur de ces gisements, mais l’institut d’études géologiques des États-Unis évalue, par exemple, la présence de nodules polymétalliques dans la zone de Clarion-Clipperton (Pacifique-nord) à 21 milliards de tonnes !

L’exploitation des fonds marins © AFP Jonathan WALTER, Paz PIZARRO, Laurence SAUBADU

Pour les scientifiques, les richesses de l’océan profond ce sont surtout les ressources biologiques (moléculaires, halieutiques) en cours d’études pour notre alimentation, notre santé, le biomimétisme etc. « Les conditions physico-chimiques sont uniques dans les profondeurs et les mécanismes de survie développés par des organismes peuvent nous inspirer », souligne Pierre-Marie Sarradin qui dirige le laboratoire Beep. Le chimiste s’inspire notamment de cette étude  qui défend une utilisation durable de l’océan basée sur la connaissance, par opposition à celle uniquement basée sur les ressources.

L’exploration scientifique : un champ d’études énorme !

 Frontière de connaissance pour la communauté scientifique, espace convoité pour ses usages et sujet actuellement discuté dans l’arène des négociations internationales (au sein de l’AIFM mais aussi dans le cadre du récent Traité sur la haute mer  (BBNJ) ou encore au sein des COP Climat et Biodiversité), l’océan profond est un champ d’études énorme !

Etudier permet en outre de réglementer (zones de protection, interdiction ou limitation de la pêche profonde).  C’est aussi assurer une surveillance sismologique : caractériser les tectoniques, évaluer et prévenir les aléas sous-marins. Un volcan sous-marin à Mayotte  a par exemple été découvert lors d’une exploration scientifique en mai 2019, révélant une activité géodynamique intense dans la région.

Peut-on prendre le risque de détruire et de causer des dommages irréversibles avant de connaître ? Aujourd’hui, les recherches s’organisent autour de trois objectifs : comprendre la dynamique de l’océan profond et le fonctionnement de ses écosystèmes ; connaître et comprendre les phénomènes biogéochimiques, géologiques, géophysiques à l’œuvre à l’interface océan-lithosphère ; observer les interactions entre l’océan profond, l’océan global et le système Terre.

Montrer les interdépendances, s’interroger sur les connectivités

Tout est interdépendant. Les systèmes des sources hydrothermales des dorsales océaniques illustrent ces imbrications « C’est là que l’interaction entre le manteau et les enveloppes externes de la terre est à son maximum », souligne Mathilde Cannat, chercheuse à l’Institut de physique du globe de Paris et impliquée dans l’observatoire EMSO-Açores.

Situé sur la dorsale médio-atlantique, le champ hydrothermal Lucky Strike est un terrain de recherche pour comprendre l’écosystème des sources et comment la faune et les micro-organismes s’adaptent à ce milieu extrême. « Ils sont soumis à de fortes perturbations physiques dues aux activités volcaniques et tectoniques naturelles. Malgré cet environnement dynamique, nos résultats montrent une lente résilience de ces communautés biologiques endémiques », écrit Jozée Sarrazin qui coordonne le programme européen DeepRest . Entre 2017 et 2024, son équipe a observé la capacité de récupération de la faune des sources hydrothermales : « On a mené des tests en créant des perturbations », explique la chercheuse. « On ne s’attendait pas à constater une récupération si lente de leur état initial en sept ans ! ».

Pour exploiter les dépôts de minéraux sulfurés de certains sites hydrothermaux, économiquement viables, l’industrie minière prétexte notamment leur fin d’activité. Au motif que la faune abondante évolue plutôt dans les sites actifs. Or les scientifiques démontrent que la réalité est plus complexe. La notion même de site inactif fait débat.

L’extraction minière risque d’assécher des sources encore présentes ou de réactiver certains dépôts inactifs en modifiant la circulation hydrothermale. « La réouverture d’anciens conduits colmatés a déjà été démontrée à la suite de prélèvements de faune ou de roches sur des dépôts apparemment inactifs », écrit Marie-Anne Cambon, océanographe microbiologiste, dans The Conversation. Des sites inactifs vraiment ? Autour de la dorsale rapide du Pacifique Est, une étude montre qu’une activité microbienne persiste sur des sites inactifs. « Même sur la dorsale atlantique, certains sites supposés inactifs sont en fait des sites de basse température abritant des bactéries et une faune spécifiques », alerte la chercheuse.

L’exploration de cette zone se poursuit depuis 2014 avec des campagnes dont les objectifs sont tant géologiques (Hermine) que biologiques (Bicose) et notamment dans le cadre du programme Lifedeeper.

Comprendre les écosystèmes pour évaluer les impacts

« L’exploitation des ressources marines aura des impacts certains sur l’environnement. Ils dépendront de la nature de la ressource exploitée, de la technologie d’exploitation utilisée et des spécificités des écosystèmes associés », alertent Jozée Sarrazin, P-M Sarradin et François H. Lallier. Dès 2017, ils décrivent des impacts pressentis : destruction de l’habitat et de la faune associée durant la collecte du minerai entraînant la formation d’un nuage de particules fines pouvant modifier la turbidité et la composition physico-chimique de la colonne d’eau, déplacements des sédiments, bruit, vibrations, lumière.

Ils soulignent l’importance de la connectivité écologique : comment ces perturbations affecteront la dispersion de la faune et des larves ? Ils posent des questionnements pertinents qui plaident pour une meilleure connaissance de cette biodiversité : dynamique de peuplement, cycle de vie, diversité génétique etc.

Représentation schématique des impacts environnementaux de l’exploitation des nodules polymétalliques, sulfures polymétalliques et encroûtements cobaltifères (extrait de DYMENT et al., 2014)

Dans la plaine abyssale de Clarion-Clipperton, fin 2024, la campagne Eden poursuit l’inventaire de nouvelles espèces. L’objectif est de mieux comprendre les liens entre la biodiversité et les nodules polymétalliques. Ils sont le seul support solide disponible sur les sols meubles des plaines : un socle de choix pour les organismes fixés tel que les coraux d’eau froide, les éponges ou les cnidaires.

Autour des nodules, cohabitent crustacés, échinodermes (dont des étoiles de mers), vers marins et communautés microbiennes. Ils sont enfouis dans le sédiment, leur diversité est très élevée. « L’enjeu c’est de les inventorier, mais aussi de comprendre le rôle de chacune dans l’écosystème et leurs cycles de vie », explique Pierre-Antoine Dessandier, chercheur en écologie benthique. En quoi cette diversité est-elle utile pour l’océan global ?

Les chercheurs s’interrogent aussi sur le rôle des nodules dans les courants de fond et le dépôt de matière organique. Assurent-ils une forme de connectivité ?

L’équipe a aussi cherché à quantifier les impacts de l’extraction : « Après plusieurs années, on voit toujours les traces des chenilles du collecteur sur le fond. Notre objectif sur place est de vérifier si la faune a pu revenir et se développer sur le site depuis son passage, C’est l’une des grandes inconnues sur les espèces des plaines abyssales : quelle est leur capacité à recoloniser une zone perturbée par des activités humaines ? ».

Une grande diversité d’espèces se développe sur et autour des nodules polymétalliques, dans les sédiments des plaines abyssales de la zone Clarion-Clipperton.@Ifremer

En juillet 2020, le Japon a entrepris le premier test d’extraction en haute mer de croûtes riches en cobalt au sommet de Takuyo-Daigo Seamount dans leur zone économique exclusive (ZEE). Quatre scientifiques ont cherché à évaluer les impacts écologiques de l’extraction un mois et treize mois après l’essai ; ainsi qu’à l’intérieur et à l’extérieur des zones de redépôts de sédiments induits. Leur étude montre que les espèces de la mégafaune (supérieures à 1 cm) abandonnent les zones soumises au passage des machines excavatrices,en particulier les plus mobiles.

Les questionnements scientifiques évoluent au fur et à mesure que les preuves de perturbations se font jour. La communauté internationale alerte sur les risques réels de perte de biodiversité, très importants dans les zones ciblées par l’exploitation minière. Comme au large de la Papouasie Nouvelle-Guinée, où une équipe française a décrit la grande sensibilité de la faune présente.

Responsabilité environnementale

Les règles relatives à l’extraction minière des grands fonds marins « doivent reposer sur des données scientifiques fiables » et être guidées par « la transparence et la responsabilité environnementale », a déclaré Leticia Carvalho, secrétaire générale de l’AIFM, confirmant une tendance pour la pause (moratoire), en mars dernier.

 « L’exploitation minière en eaux profondes présente des risques environnementaux, climatiques et économiques majeurs, pour des bénéfices très incertains », assure de son côté la Coalition internationale pour la sauvegarde des grands fonds marins.

« Les décideurs politiques doivent donc évaluer si les pressions économiques pour extraire les minéraux des fonds marins sont compatibles avec la protection des écosystèmes marins et de leur biodiversité », déclare le Conseil consultatif des sciences des académies européennes (EASAC). Pour éclairer le débat en cours dans l’Union européenne et plus largement, elle publie ce document.

 Valeur de la connaissance

Quelles solutions durables se dessinent pour ralentir la pression, anticiper les dérives ? Le comité Ethique en commun composé par l’INRAE-Cirad-Ifremer-IRD, avance le besoin de créer un statut juridique plus robuste pour protéger les grands fonds marins. Celui de patrimoine commun de l’humanité n’étant pas contraignant. L’approche bénéfices/risques se contentant de développer la culture d’impact.

Dans son avis de juin 2024, il évoque le statut de « personnalité juridique » qui permettrait de ne plus considérer les grands fonds marins comme des ressources exploitables et de reconnaitre leur valeur intrinsèque et morale. Il soulève ainsi une interrogation fondamentale sur la valeur de la connaissance.

Ne serait-ce pas le moment pour tous les acteurs, des industriels aux instituts de recherche et aux citoyens, de se mobiliser autour de cet enjeu suprême ?


A lire : Expertise collective de 2014 « Impact environnementaux de l’exploitation des ressources minérales profondes »

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