Alors que l’urgence climatique pousse à l’accélération des projets éoliens offshore, une inquiétude majeure se confirme : le développement massif de cette énergie renouvelable se fait souvent au détriment des écosystèmes marins vitaux. Une nouvelle étude internationale documente le chevauchement dangereux entre des zones clés de biodiversité et celles de déploiements de projets éoliens offshore.
par Laurie Henry
Photo de couverture : Albatros à nez jaune (Thalassarche carteri) au large des côtes d’Afrique du Sud. Cette espèce fait partie des oiseaux marins dont les zones d’alimentation peuvent chevaucher les zones de développement de l’énergie éolienne en mer. © Juan Manuel Pérez-García
Alors que les projets éoliens offshore se multiplient pour répondre à l’urgence climatique, une inquiétude grandit quant à leur impact sur la faune marine. Ces infrastructures, souvent installées dans des zones riches en ressources énergétiques, coïncident fréquemment avec les aires de nourrissage de nombreuses espèces de mammifères marins et d’oiseaux de mer. Une nouvelle étude internationale met en lumière ce chevauchement préoccupant. Pour la première fois, des chercheurs ont établi des cartes mondiales de risques, croisant la dynamique des réseaux trophiques marins avec le potentiel énergétique éolien. L’objectif est clair : mettre fin à la planification au cas par cas et permettre une stratégie spatiale qui concilie l’ambition climatique et la survie des espèces les plus vulnérables.
Une expansion rapide et peu encadrée de l’éolien offshore
L’éolien en mer connaît une croissance spectaculaire à l’échelle mondiale, soutenue par les engagements climatiques de nombreux États. Selon les données du Global Wind Energy Council, la capacité mondiale installée pourrait atteindre 380 GW d’ici 2030, contre 64 GW en 2022. L’Europe du Nord, la Chine, et plus récemment les États-Unis, concentrent l’essentiel des projets en cours ou à venir, et ces déploiements s’inscrivent dans une logique d’accélération de la transition énergétique face à la nécessité de réduire rapidement les émissions de gaz à effet de serre.
Mais cette dynamique s’opère dans un flou relatif sur le plan écologique : à l’heure actuelle, peu de pays disposent d’un cadre réglementaire exigeant une évaluation fine des impacts environnementaux cumulatifs en mer. Les autorisations de parcs éoliens offshore sont souvent délivrées au cas par cas, sans vision d’ensemble sur les impacts à moyen et long terme sur les écosystèmes marins. Les installations offshores sont peu évaluées une fois réalisées, leur suivi étant coûteux et parfois techniquement limité en mer. Par ailleurs, les données biologiques marines disponibles sont très inégalement réparties.
